Lettre ouverte à Monsieur Éric VAILLANT, Procureur de la République
Lettre ouverte à Monsieur Éric VAILLANT, Procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Grenoble
Monsieur le Procureur,
Lors de la rentrée solennelle du 24 janvier dernier, vous avez tenu à rappeler que, en 2019 à Grenoble, le nombre de prévenus jugés selon la procédure de comparution immédiate avait cru de 53,6 % et « que cette politique pénale volontariste et assumée a entraîné une augmentation de la population carcérale et même de la surpopulation carcérale qui me conduit à être particulièrement vigilant sur les conditions d'exercice des surveillants pénitentiaires et à développer la régulation carcérale, c'est à dire à organiser, après le choc de l'incarcération, le retour contrôlé des délinquants à la liberté. Au 1er janvier 2019, le taux d'occupation du centre pénitentiaire était de 149% avec 316 détenus majeurs hébergés (615 entrants). Au 1er janvier 2020, ce taux est monté à 160% avec 340 détenus (778 entrants) pour 212 places théoriques. »
Il apparaît ainsi que la politique pénale à l’échelle du ressort du Tribunal judiciaire de Grenoble a provoqué un accroissement de la population pénale au sein du centre pénitentiaire de Varces.
Faut-il rappeler que, pour cet établissement, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a noté que « L’ensemble des locaux (…) est vétuste et les conditions d’hébergement sont indignes » (rapport de la visite de 2016) ? Que le juge administratif a déjà condamné l’État en raison de ces conditions de détention et qu’il est probable qu’il le fasse de nouveau ?
Concrètement, les personnes détenues restent entre 20 et 23 heures par jour avec un ou deux codétenus, dans des cellules d’une superficie d’un peu moins de 9 m². Si l’on déduit l’espace occupé par le mobilier et par les sanitaires dans la cellule, il ne reste, au mieux, qu’un espace personnel inférieur à 2,5m². Outre cette promiscuité, il faudrait également parler de l’insalubrité, de la saleté, de l’humidité, de l’absence d’intimité avec des toilettes non entièrement cloisonnées. Les installations collectives sont également vétustes et insuffisantes.
Il est ainsi très préoccupant de lire qu’un procureur, en connaissance de cause, milite pour une politique pénale qui a nécessairement pour conséquence la violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme.
Toujours dans son dernier rapport de visite, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté relevait que « La détention est émaillée de nombreux incidents et actes de violence favorisés par un phénomène de surpopulation permanente et par des conditions d’hébergement et d’hygiène déplorables. Il est indispensable de remédier à cet état de surpopulation. » Nous ne doutons pas que les personnes détenues avec lesquelles vous avez pu échanger n’ont cessé de vous le répéter, lors de vos visites de cet établissement, conformément à l’article D. 178 du code de procédure pénale.
Il est alors regrettable que le parquet soit resté sourd à ce constat, ce alors qu'une stricte application de la loi devrait au contraire commander le recours aux aménagements de peine ab initio et ne devrait justifier l'incarcération qu'en dernier recours.
Je vous prie de croire, Monsieur le Procureur de la République, à l'assurance de ma considération.
Amélie MORINEAU,
Présidente de l'Association A3D
Contact presse : Sylvain GAUCHE, 06 80 04 57 65
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